Dans un message du 27 décembre, je faisais état d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme relatif aux jugements criminels. La Cour d’assises, c’est par nature très important, mais pas d’application quotidienne.
Le contentieux correctionnel, en revanche, est quantitativement bien plus significatif.
C’est à ce titre qu’un arrêt de la Cour de cassation du 12 octobre 2010 (10-81044) est intéressant.
Formellement, il ne crée rien de particulier, car c’est la loi dite pénitentiaire du 24 novembre 2009″, qui a inséré à l’article 132-24 du Code pénal un troisième alinéa disposant désormais qu’ « en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l’article 132-19-1, une peine d’emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu’en dernier recours si la gravité de l’infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ».
Encore fallait-il tirer les conséquences de cette réforme législative récente avec autant de netteté que ne l’a fait la Cour de cassation dans l’arrêt dont il est ici question, eût égard à l’affaire, plutôt modeste, qui lui était soumise. En l’espèce en effet, un prévenu avait été condamné à 3 mois d’emprisonnement ferme pour vol, et les juges correctionnels pensaient sans doute s’être largement acquittés de leur tâche en prenant la peine d’expliquer « que les faits sont d’autant plus graves qu’ils ont été commis au préjudice d’une personne âgée qui reste psychologiquement traumatisée et que la peine tient exactement compte de la personnalité du prévenu ».
Raté. Comme ils n’ont pas explicitement précisé en quoi une autre sanction que l’emprisonnement était manifestement inadéquate, la Cour de cassation se montre sans pitié pour ces juges en estimant qu’ils n’ont pas satisfait aux exigences de l’article 132-24 précité.
C’est très formel, car il leur aurait suffit sans doute de répéter certaines de caractéristiques de l’affaires déjà évoquées dans la motivation du jugement relative à la cuplabilité. Et presque « injuste », pourrait-on dire, pour ces juges correctionnels, les autres tribunaux produisant chaque jour en France des jugements encore bien moins motivés que le leur pour une « simple » (qui ne l’est certes jamais pour le principal intéressé) peine de trois mois d’emprisonnement.
Mais l’essentiel est que la Cour se soit saisie de cette occasion pour envoyer un message à tous les tribunaux, justement. Qui vont y réfléchir à deux fois, encore un peu plus qu’avant, au moment d’écarter une peine alternative à l’emprisonnement. Car ils savent qu’après avoir pris leur décision, ils vont devoir la motiver. Ce qui impose un surcroît de travail. Voilà comment on influence, parfois, la décision d’un tribunal.
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