Comment reconnaître une attestation pas très spontanée
Publié le :
16/06/2011
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2011
Mode d'emploi pour inviter la justice à tirer sur le fil et défaire une pelote mal nouée
Certaines cantines d'entreprise ont apparemment une organisation militaire.
Mon client s'étant vu refuser, par une employée zélée, l'accès à certains plats du fait de son grade - à quoi tient une longue procédure judiciaire... - il aurait, selon elle, manifesté son mécontentement en termes peu amènes.
En échange, la serveuse rancunière lui avait administré une gifle, mais cela ne lui suffisait pas : elle était en plus allée porter plainte, et avait transmis ladite plainte à la direction de l'entreprise qui, sans doute trop heureuse de trouver enfin un "motif" (les guillemets sont volontaires) pour se débarrasser d'un élément peut être parfois contrariant dans le cadre de ses fonctions syndicales et qui s'apprêtait à se présenter de nouveau aux élections, s'était lancée, ni plus ni moins, dans la théoriquement lourde procédure de licenciement d'un salarié protégé. Laquelle avait, à ma grande surprise, aboutit. Je n'exerce pas en droit du travail, mais la motivation de l'autorisation administrative, qui estimait comme établis les faits dénoncés unilatéralement, me laissait pantois. D'autant qu'ils avaient été classés sans suite, même si cela ne lie pas l'administration dans ce cadre.
Bref, pour une querelle sur un plat, mon client se retrouvait giflé, licencié, carrière syndicale finie.
Dire qu'il comptait sur moi était donc un euphémisme. Je devais faire condamner l'employée pour dénonciation calomnieuse, transmettre cela à mon collègue qui défendait le client en droit du travail, et qui sur cette base devait faire annuler le licenciement. Ben voyons.
Naturellement, je l'ai prévenu du taux d'échec extrêmement élevé en la matière (voir mon propos général sur la Dénonciation calomnieuse). D'autant qu'il fallait également attaquer du chef de fausse attestation - une infraction tout aussi rarement reconnue - une camarade de la serveuse qui s'était empressée de témoigner pour elle.
Et justement, elle l'avait fait en des termes un peu trop ressemblants pour que cela soit vrai : son attestation reprenait exactement le contenu de la plainte de sa collègue, à la virgule près, sur une page entière ! A peine téléguidée, l'attestation... En plus, à l'audience, les deux copines bafouillent, ont la même avocate (pas très futé, ça), qui utilise d'autres témoignages avec la même trame que celle utilisée pour l'attestation litigieuse...
Il faut ajouter à cela que le contexte social de l'entreprise était caricatural, puisque mon client avait déjà été licencié à tort, et réintégré suite à annulation judiciaire du licenciement, et que nombre de ses camarades avaient subi le même sort.
C'était d'ailleurs parfait pour obtenir autant de témoignages, car on sait combien les salariés licenciés retrouvent leur liberté de parole (voire un peu plus, quand il y a de la rancune...).
Un faisceau d'indices était donc créé - comme quoi on n'a pas toujours besoin de la preuve "mathématique" même en dénonciation calomnieuse - pour que le miracle judiciaire se produise : condamnation pénale des deux employées, puis annulation de l'autorisation administrative de licenciement, réintégration du salarié, réélection à un mandat syndical.
Dommage que l'absence de motivation du jugement correctionnel ne permette pas de restituer les débats, mais le résultat est là.
Néanmoins, à l'instar des avertissements pour les cascades au cinéma, j'allais dire : n'essayez pas de faire la même chose tout seuls chez vous, cela fonctionne rarement...
Echelle de ludique (1) à technique (5) : 2
Historique
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