Du choix pas si évident entre les différentes procédures d’urgence familiale

Du choix pas si évident entre les différentes procédures d’urgence familiale

Publié le : 18/02/2014 18 février févr. 02 2014

A propos du problème du domicile conjugal entre concubins

En situation de violences conjugales, a priori, il n’y a pas photo, entre les différentes procédures d’urgence.

Surtout en matière de logement entre concubins, où là, c’est le tout ou rien. D’un côté, le référé « classique », dans lequel le Juge aux affaires familiales constate son absence de pouvoir pour attribuer la jouissance exclusive du logement familial à l’un des deux (alors qu’il a ce pouvoir concernant les couples mariés). De l’autre, l’ordonnance de protection (OP), où il peut carrément ordonner l’expulsion de l’adversaire – qu’il restera certes à faire exécuter (je parle de l’expulsion, pas de l’adversaire…).

Seulement voilà, encore faut-il obtenir l’OP, ce qui ne se fait pas comme ça. Le critère posé par l’article 515-9 du Code civil, c’est le « danger ». Et à Bobigny, en la matière, la barre est placée assez haut. Si certains dossiers passent parfois avec une curieuse facilité, dans ce souci « redistributif » qui amène des injustices à l’envers, d’autres sont au contraire durement rejetés sur le fondement de pratiques discutables, qui ont tendance à réécrire la loi. Ainsi, il n’est écrit, nulle part dans celle-ci, que tel type de certificat médical est imposé ; pourtant, à Bobigny, la recevabilité des requêtes en OP se transforme un peu en droit des UMJ…

Or ma cliente n’avait pas de certificat médical venant de ce service là, et les faits de violence allégués accusant quelques jours d’ancienneté, il n’était plus temps de s’y rendre.

Nous risquions de perdre un peu de temps – certes pas beaucoup – mais aussi d’énergie, à s’aventurer dans cette procédure, pour éventuellement aboutir à un rejet.

C’est pourquoi ma cliente a préféré directement la voie du référé classique.

En plus, pas de chance, alors que j’avais réussi à lui obtenir une audience rapide – en l’occurrence 9 jours – l’adversaire se présente avec une pile de pièces impressionnante, et pas seulement d’un point de vue quantitatif, mais aussi qualitatif.

Après une intense réflexion de quelques minutes, nous préférons opter pour le renvoi. Le juge, dans une logique aussi implacable que le nombre de dossiers qui l’accable, considère que si nous avons cet ordre de priorités – bien répondre aux pièces de l’adversaire avant d’obtenir le jugement – c’est que ce dernier n’est pas si urgent. L’audience à laquelle il renvoie n’est donc cette fois pas à 9 jours, mais à 2 mois.

Ma cliente sort donc de l’audience lestée d’une pile de pièces adverses à regarder et d’un renvoi à 2 mois…

Sa décision n’aura pourtant pas été la plus mauvaise.

Elle s’est certes bien coordonnée avec le traitement parallèle de sa plainte pénale contre le même adversaire – il faut dire qu’on a invité les enquêteurs à agir en ce sens. Toujours est-il que l’adversaire ayant été par ce biais « invité » à habiter ailleurs quelques temps, l’insuffisance de la procédure de référé familial classique sur ce point, s’est trouvée temporairement résolue.

Et comme, sur le reste, ma cliente a mis à profit le délai de renvoi pour trouver des pièces susceptibles de contrer l’argumentaire adverse, l’ordonnance en (la forme des) référés obtenue est au bout du compte excellente sur les points sur lesquels, au moins, elle a compétence, à savoir la résidence des enfants (et la pension alimentaire).

Certes, elle ne règle pas, à terme, la question du logement. Il faudra donc que ma cliente en trouve un autre. Mais à ce moment là, elle aura la résidence des enfants, telle qu’elle la souhaitait.

Echelle de ludique (1) à technique (5) : 3

Historique

  • Amélioration civile et surtout pénale de la lutte contre les violences conjugales
    Publié le : 05/10/2014 05 octobre oct. 10 2014
    Droit de la famille
    Amélioration civile et surtout pénale de la lutte contre les violences conjugales
    La loi n° 2014-873 du 4 août 2014 ne vise pas une révolution, mais contient des dispositions techniques, d'importance diverse. Sur le plan civil, elles confirment la place de l'ordonnance de protection. Au niveau du champ d'application, le danger, critère d'intervention de cette procédure,...
  • Du divorce low cost au divorce carrément cheap
    Publié le : 23/09/2014 23 septembre sept. 09 2014
    Droit de la famille
    Du divorce low cost au divorce carrément cheap
    La baisse des prix a du bon, jusqu’à un certain point. Je suis une profession libérale et j’assume : je suis convaincu que la concurrence et la circulation de l’information possèdent davantage d’aspects positifs que négatifs. Je pense que les citoyens ne se portent pas plus mal que du temps ou...
  • Et que se passerait-il si les radars de la sécurité routière flashaient Conchita Wurst ?
    Publié le : 01/09/2014 01 septembre sept. 09 2014
    Droit pénal
    Et que se passerait-il si les radars de la sécurité routière flashaient Conchita Wurst ?
    Quand le titulaire de la carte grise est une femme et que la photographie prise par le radar montre un homme, normalement, ça devrait aller. Le juge de proximité de Limoges avait eu la dent dure contre cette propriétaire de véhicule, qui avait cru que les débats pourraient s'arrêter là en fais...
  • Une CRPC décidément pas comme les autres
    Publié le : 24/03/2014 24 mars mars 03 2014
    Droit pénal
    Une CRPC décidément pas comme les autres
    Il arrive que le Procureur abandonne carrément les poursuites. Suite à l’ « échec CRPC » (comme on dit dans le jargon judiciaire) du 21 octobre 2013, j’avais indiqué à mon client, comme d’usage dans cette hypothèse, qu’il fallait désormais attendre la convocation à une audience du circuit dit...
  • Quand la France fait ce qu'elle veut de la convention franco marocaine du 10 août 1981
    Publié le : 20/03/2014 20 mars mars 03 2014
    Droit de la famille
    Quand la France fait ce qu'elle veut de la convention franco marocaine du 10 août 1981
    Si la France a ses raisons pour repousser l'application du droit du divorce marocain, on se demande pourquoi elle a signé, ou en tout cas maintenu une convention indiquant le contraire, le droit international, et le droit tout court d'ailleurs, n'étant a priori pas fait pour changer d'avis quand...
  • Salut l’artiste
    Publié le : 04/03/2014 04 mars mars 03 2014
    Droit de la famille
    Salut l’artiste
    Êtes-vous divorcé quand votre époux décède en cours de délibéré ? Il était dit que ce dossier serait vraiment particulier. Après avoir guerroyé (voir actualité du 4 février 2010) pour obtenir une pension devant la Cour en appel de l’ONC, nous revenions devant elle, cette fois en appel du ju...
  • Du choix pas si évident entre les différentes procédures d’urgence familiale
    Publié le : 18/02/2014 18 février févr. 02 2014
    Droit de la famille
    Du choix pas si évident entre les différentes procédures d’urgence familiale
    A propos du problème du domicile conjugal entre concubins En situation de violences conjugales, a priori, il n’y a pas photo, entre les différentes procédures d’urgence. Surtout en matière de logement entre concubins, où là, c’est le tout ou rien. D’un côté, le référé « classique », dans...
  • Comment organiser son droit de visite et d’hébergement à l’autre bout du monde
    Publié le : 06/02/2014 06 février févr. 02 2014
    Droit de la famille
    Comment organiser son droit de visite et d’hébergement à l’autre bout du monde
    Le père résidant au Canada et n’ayant pas vu son enfant depuis 2 ans peut tout de même obtenir un jugement l’autorisant à le voir pendant les vacances, dès lors qu’il ne s’est pas désintéressé de la question. Pour une fois, je n’ai pas vu le client en vrai. Jamais. Même pas à l’audience. Il faut...
  • Le petit jeu de la provocation entre policiers et jeunes
    Publié le : 04/02/2014 04 février févr. 02 2014
    Droit pénal
    Le petit jeu de la provocation entre policiers et jeunes
    Il est essentiel d’essayer de reconstituer minutieusement les faits ayant abouti à une procédure pour outrage. Les policiers sont des malins. Globalement, c’est heureux, pour le citoyen qu’ils protègent. Mais parfois, il faut faire attention à la façon dont ils utilisent leurs ficelles. Mon...
<< < ... 6 7 8 9 10 11 12 ... > >>